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Polymères biosourcés et biodégradables

Miser sur l’innovation pour intégrer les polymères biodégradables et biosourcés dans les procédés industriels

Si nous voulons sortir du pétrole et lutter durablement contre la pollution plastique, il est capital d’accélérer l’innovation en ce qui concerne les biosourcés, les compostables et le réemploi. Cette démarche d’innovation nécessite des efforts en termes de R&D, de nouvelles manières de travailler et la mise en œuvre de partenariats avec les fournisseurs de matière.

 

Bioplastiques : de quoi parle-t-on ?

 

Derrière le terme « bioplastiques », on regroupe 2 catégories de polymères :

  • Les polymères biosourcés, issus de la biomasse (au moins partiellement) ;
  • Les polymères biodégradables, « qui se décomposent en éléments divers sous l’action d’organismes vivants ».

Un biosourcé n’est donc pas forcément biodégradable et vice versa !

Pourquoi les bioplastiques ?

Biosourcé : pour sortir du pétrole

Chaque année, les polymères pétrosourcés consomment 44 millions de tonnes de pétrole, en Europe. C’est beaucoup, quand on sait que les Français utilisent 70 kg de plastique par an !

C’est donc le principal enjeu des polymères biosourcés : mettre un frein à la dépendance au pétrole du secteur de la plasturgie et donc rétablir l’équilibre dans les flux de carbone.

 

Biodégradable : pour faire du “Retour à la nature” une réalité

Le décret 3R (Réduction, Réemploi, Recyclage), mis en place suite à l’application de la loi Anti-Gaspillage et pour une Economie Circulaire (AGEC), fixe des objectifs de réduction et de recyclage pour les emballages à usage unique. 

Si le deuxième « R », c’est-à-dire le Réemploi, a tendance à être mis de côté au détriment du recyclage, il faut savoir que ce principe des 3R s’inspire de 5 principes fondamentaux1 popularisés par l’ouvrage « Zéro déchet » de l’auteure américaine Béa Johnson. 

Le « Retour à la terre », c’est-à-dire le compostage, fait ainsi partie intégrante du cercle vertueux de l’économie circulaire, bien qu’il soit le grand oublié de la stratégie 3R, qui est plus favorable au recyclage.

 

L’innovation dans le domaine des bioplastiques : quels enjeux pour les industriels ?

Répondre aux attentes des consommateurs

C’était l’une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat de 2019 : le « développement des emballages biosourcés compostables pour assurer la transition avant la fin de l’emballage plastique à usage unique ».

Les matières compostables et les biosourcées sont notamment bienvenues pour les applications où le recyclage est trop complexe à mettre en place. Il est donc urgent d’accélérer l’innovation dans ce domaine afin de faire émerger rapidement des solutions nouvelles qui répondront aussi aux attentes des consommateurs.

 

Devenir résilient en misant sur plusieurs options

Du point de vue du consommateur, ce qui compte ce n’est pas tant l’emballage que le produit à l’intérieur et le prix qu’il va payer à l’achat. 

Tant que le produit est le même et que les changements sont peu visibles, le consommateur prêtera donc peu d’attention à un changement de la matière constituant l’emballage.

Un industriel qui souhaite passer aux bioplastiques peut donc tout à fait miser sur plusieurs solutions d’emballage. C’est même souhaitable pour faire face à l’hétérogénéité du monde des bioplastiques, que ce soit en termes de prix ou de disponibilité.

Faire évoluer les cahiers des charges : une nécessité !

Les propriétés des bioplastiques ne sont pas exactement identiques à celles des pétrosourcés, mais cette différence ne doit pas être vue comme un frein, tant les enjeux environnementaux et sanitaire sont importants.

Pour gagner en résilience et rééquilibrer la balance environnementale, les industriels doivent donc faire des concessions sur leurs cahiers des charges, certaines exigences étant peu utiles !

Dans une démarche de sobriété, est-il réellement important qu’un paquet de pâtes ait une DLUO de 2 ans, quand on sait que ce produit sera consommé dans l’année ?

 

Comment innover avec les bioplastiques ?

État des lieux de l’innovation

Dans un rapport d’information de 2019, le groupe SPHÈRE, l’un des principaux producteurs mondiaux de résines biosourcées et compostables pour films et sacs, souligne le dynamisme de la recherche sur les matériaux biosourcés et biodégradables, avec plus de 1400 publications par an.

Même constat pour ce qui est des dépôts de brevet : d’après l’Office européen des brevets, plus de 40 000 brevets auraient été déposés concernant les bioplastiques entre 2010 et 20192. L’Europe et les États-Unis arrivent en tête, devant le Japon.

Ce dynamisme est toujours présent, mais il est nécessaire que les autorités3, notamment l’Europe, soutiennent clairement l’innovation en la matière, afin d’accélérer l’adoption de nouvelles solutions.

 

Travailler avec les fournisseurs de bioplastiques pour aller plus vite

Les industriels ont tout intérêt à s’associer avec les fournisseurs de bioplastiques, afin de développer des solutions pérennes, qui conviennent à leurs applications et répondent parfaitement à leur cahier des charges.

Travailler main dans la main avec les fournisseurs permet :

  • D’optimiser la démarche d’innovation ;
  • D’accélérer le passage de l’échelle laboratoire à l’échelle industrielle.

Exemple : Transition vers un emballage de confiseries biosourcé

Pour réussir cette transition, le transformateur doit être en mesure d’obtenir une qualité satisfaisante avec une productivité équivalente, c’est-à-dire être capable de produire le même nombre d’emballages par minute.

Arriver à ce résultat nécessite souvent de réadapter des paramètres process (température, etc.) et de choisir de nouveaux grammages. Cette phase de R&D demande du temps et des ressources !

Intégrer le fabricant de matière aux essais R&D permet de fluidifier le développement et d’obtenir une matière sur-mesure. De plus, le savoir et l’expérience qui seront acquis seront également réutilisables, ce qui peut aussi accélérer de futurs développements.

 

Transformer les méthodes de travail et les process

Au-delà de la simple innovation technique, il faut surtout que les industriels réinventent leur manière de travailler, ce qui est déjà, en soi, une innovation ! 

Dans un article pour la revue Polytechnique insights4, Patrick Pinenq, chargé d’affaires biopolymères chez Total, explique ainsi que la question des volumes de matière disponibles est le paramètre clé. C’est d’ailleurs ce qui fait la force du pétrole dans la production des 360 millions de tonnes de plastique annuels. L’article donne par ailleurs des pistes de travail :

  • Repenser les tailles d’unités de production en intégrant des process des biotechnologies ;
  • Se concerter avec les acteurs en amont et en aval de la chaîne de production ;
  • Mettre en place une démarche d’écoconception et évaluer la performance environnementale de chaque solution, grâce à l’ACV ;

Néanmoins, à l’avenir, la disponibilité ne sera plus seulement une question de volume, mais aussi d’accessibilité. Dans un monde instable, on voit déjà les effets de tensions géopolitiques (gaz Russe ou terres rares Chinoises par exemple) sur l’accessibilité des matières premières. Dans ce contexte, l’utilisation de ressources locales apparaît donc comme une des clefs de la résilience des entreprises.

 

  1. https://www.goodplanet.info/actu-fondation/connaissez-vous-la-regle-des-5r/ []
  2. https://link.epo.org/web/patents_for_tomorrows_plastics_study_key_findings_fr.pdf []
  3. https://www.european-bioplastics.org/policy/revision-of-the-packaging-and-packaging-waste-directive/ []
  4. https://www.polytechnique-insights.com/dossiers/industrie/bioplastiques/produire-des-bioplastiques-a-lechelle-industrielle-quel-sont-les-enjeux []